L’église romane, symbolise le pouvoir religieux…

Le style sobre du petit édifice, qui coiffe la colline en son point le plus haut, correspond assez à ce que nous disent les sources écrites : en 1199, l’existence de Henricus, sacerdos (prêtre) de Montquentin est en effet attestée dans l’acte d’une donation faite par Thibaut, seigneur de La Tour à l’abbaye d’Orval. Un lieu de culte existait donc sur place, avant l’instauration d’une seigneurie qui n’est officialisée que deux générations plus tard (Raoul, fils de Thierry de La Tour). Notons que l’on désigne alors « Mont-Quentin » et non « Mont-St-Quentin » de sorte que le village ne doit pas tirer son nom du saint patron de la paroisse mais plutôt de la présence d’un Quentin (Quintus ?) à cet endroit. Le village aurait donc préexisté et l’on aurait ensuite sacralisé le nom pour l’église. La paroisse de Montquintin recouvrait jadis les villages de Couvreux, Dampicourt et Ecouviez (France), ainsi que quelques écarts comme Langlissant (à Lamorteau), Grihir (ferme de Villers-la-Loue) et Drussigny.

L’église Saint-Quentin, installée sur une terrasse émergente et entourée de son petit cimetière, frappe par ses proportions trapues et sa position dominante. Une simple toiture à deux versants englobe également la tour-porche à l’Ouest. Sans doute par crainte de la foudre en a-t-on rabaissé le clocher ?  A l’est, le chevet à trois pans est stabilisé par deux lourds contreforts. L’intérieur est sommaire : passé le porche de style Renaissance, la tour laisse place à une nef simple, couverte d’un plafond plat, qui précède un joli chœur voûté d’ogives. Il est enserré entre deux sacristies, celle de droite servant aujourd’hui de chaufferie. Les baies sont variées : aux petites ouvertures cintrées de la nef succède, au Nord-Est une haute et belle fenêtre en gothique flamboyant, puis, dans le chœur, deux fenêtres elles-aussi en plein cintre.

Des examens attentifs ont pu déterminer la chronologie de l’édifice qui a subi, jusqu’au milieu du 20ème siècle, une constante évolution. Ainsi, dans un premier temps se distingue une petite nef simple et droite, plus étroite qu’aujourd’hui et qui, peut-être, était déjà raccordée à la tour. Encore que le désaxement des deux parties semble indiquer deux constructions successives. Au Haut Moyen-Age, beaucoup d’édifices religieux sont de simple plan quadrangulaire, et qui sait si la tour d’entrée n’est pas apparue ensuite, en même temps que le chœur qui avait alors une tout autre apparence.

A la période gothique, un apport majeur est constitué par l’installation dans l’angle Nord-Est de la « Chapelle des Seigneurs » dont les beaux vitraux modernes rappellent les familles principales. Les sires de Montquintin y accédaient par une petite porte sur la face Sud, aujourd’hui disparue. Le style flamboyant de la fenêtre ne date pas cet aménagement avant le 15ème siècle. Précisément, la clef de la voûte d’ogives nervurées, qui s’aboutissent en colonnettes pour cerner le périmètre, s’orne d’un écu portant en chef un croissant, armes des de VILLE, seigneurs de Montquintin entre 1400 et 1500 environ.

Du 17ème au 18ème siècle, plusieurs transformations auront lieu. En 1628, une visite de l’archidiacre enjoint au curé de Montquintin de remettre « les murailles en suffisant estat et ce aussy tost que la saison le permettra ». Le chœur est endommagé, et la toiture détruite. Le 17ème siècle et les conflits franco-espagnols n’épargnent guère Montquintin, puisqu’il est pris en 1647 puis 1657. Il faudra donc attendre pour que le bâtiment soit entièrement réinterprété. La nef s’élargit alors. Deux bas-côtés la complètent dont celui de gauche permet ainsi d’englober la Chapelle des Seigneurs, qui était en excroissance, dans l’alignement de l’édifice. Le chœur est lui aussi transformé et agrandi. Il est couvert de deux voûtes d’ogives dont une clef date ce réaménagement de 1711, époque où le Comte Michel de SUYS est souverain du lieu. Une plaque scellée dans le mur rappelle à cet endroit le souvenir de la famille. Peut-être peu après a-t-on supprimé la distinction entre la nef et les bas côtés. Aujourd’hui, elle apparaît sans division, relativement homogène sous un seul plafond plat. De même, la porte principale en plein cintre posée sur des pilastres doit être du milieu du 18ème siècle.

Tout au long de son histoire l’église et le village souffrent probablement d’une position exposée, du dépeuplement progressif et plus encore sans doute, des guerres modernes, durant lesquelles – comme jadis – Montquintin est un poste militaire d’observation idéal. Avant la seconde guerre mondiale, existait un projet de L. Servais, architecte à St-Mard, pour quelques interventions destinées à réparer des dégâts, sans doute du 1er conflit mondial. En 1940 , un obus endommage la tour, qui ne sera restaurée qu’en 1950. Le 20ème siècle sera d’ailleurs propice à diverses restaurations : portail et face ouest de la tour, ainsi que la façade Nord de la Chapelle des seigneurs. Aujourd’hui, mais dans une moindre mesure, l’église Saint-Quentin subit toujours les mêmes maux. La crise des vocations religieuses, qui raréfie les offices, et les complications administratives n’offrent guère d’autres solutions que celles que lui apportent les contributeurs bénévoles.

Pour plus de détails, voir : J.-L. JAVAUX et P. SCHERER, Eglises anciennes de Gaume, dans Le Pays Gaumais, 1981-1982, pp. 23-36.